une femme se tient le menton signe de doute

Et vous ? Êtes-vous indispensable ?

Dans son allocution télévisée du 16 mars 2020, le président de la République en pleine montée d’épidémie de Coronavirus, a annoncé que seules les personnes ayant un métier dit « indispensable » seraient autorisées à travailler en cette période si particulière. Les autres, les « non-indispensables » devaient alors rester chez eux pour freiner la propagation de la maladie et limiter leurs sorties à l’indispensable encore une fois…

Le concept des « indispensables », reprit ensuite dans les médias, applaudis chaque soir à 20 heures aux balcons, a émaillé la longue période de confinement rappelant ainsi à tous : « ceux qui l’était » et « ceux qui ne l’était pas ».

Ceux qui le sont & ceux qui ne le sont pas

L’indispensable, c’est celui « dont on ne peut se dispenser, qui est obligatoire ; vital[1] ». Alors les personnes n’ayant pas eu l’autorisation de se rendre à leur travail, pendant près de 2 mois parfois, ne seraient-elles pas « vitales » à la société ? La société existerait-elle sans l’ensemble des personnes qui la composent ?

Il n’est évidemment pas question ici de discuter du bien fondé de la décision prise de limiter les mouvements d’une partie de la population pour la protéger. Mais bien d’une formule rhétorique maladroite. L’emploi de ce terme par le chef de l’Etat ne risquerait-il pas une accentuation d’une fracture sociale déjà bien installée ? En créant deux nouvelles catégories de population « les indispensables » et les « non indispensables ».

Ajoutez à cela que les non-indispensables ont eu, de fait, beaucoup de temps dit « libre » pour réfléchir à ce travail non indispensable qu’ils occupaient, à questionner leur place dans la société.

Durant cette période, les managers ont dû accompagner et répondre à des collaborateurs errants sur la toile, passant de réunion Zoom en entretiens téléphoniques et se questionnant sur leur utilité et celle de leur travail. Certains n’ayant plus aucune activité car cette dernière était dite « non-télétravaillable » voir même sans perspective d’une reprise normale avant des mois. L’arrêt de cette dernière a même parfois balayé les efforts des mois précédents rendant difficile pour les collaborateurs la possibilité de se projeter dans l’avenir. Parce que le terme employé par le premier des français lors de l’annonce de la mise en place du confinement est venu questionner l’utilité de chaque individu et de son investissement au sein de la société.

Or, pour avancer, chacun a besoin de trouver du sens dans son action, être persuadé (ou se persuader) que son intervention sert à quelque chose. Alors ne pas être indispensable voudrait-il dire que l’on ne sert à rien, que l’on n’est pas utile à la société, qu’elle fonctionnerait aussi bien sans nous ?

Le management des « non indispensables »

Le management a cette fonction indispensable de parvenir à donner du sens à ce que les personnes font, le pourquoi (la raison) et le pour quoi (l’objectif) nous le faisons. Parce que ce qui déclenche l’action des individus, c’est qu’ils y trouvent du sens. Les personnes agissent lorsqu’elles connaissent la raison de leur action, qu’elles ont la possibilité d’entrevoir que cette dernière a une utilité pour eux-mêmes et/ou pour la collectivité.

Aujourd’hui, la mission des managers est de réussir à REdonner ce sens mis à mal. Le redonner à l’intervention de chaque collaborateur, à l’inscrire dans celui d’une équipe et plus largement d’une entreprise d’une institution quand bien même son caractère a pu être discuté à un moment donné. Car nous le voyons bien aujourd’hui, en constatant à distance les ravages qu’aura créé cette période, la société est un système complexe et complet. Enlevez un maillon de cette chaîne et la machine s’enraye, peine à fonctionner correctement.

[1] Définition Larousse ; https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/indispensable/42642; consulté le 7/08/20 à 10h45

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