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Exit la simple QVT, quelles nouveautés avec la QVCT?

La qualité de vie au travail, communément connue sous l’acronyme QVT a fait son apparition il y a quelques années dans le monde professionnel.

Issue des conclusions de l’accord national interprofessionnel du 19 juin 2013[1], le concept de QVT s’est développé au sein des entreprises, à travers des propositions variables allant de la livraison de paniers de fruits frais à des processus hiérarchisés et formalisés. Il n’est plus rare aujourd’hui de constater la présence d’espace de jeux (qui ont fait bondir les ventes de baby-foot), l’accès à des conciergeries, des cartes de restauration healthy ou encore l’organisation régulières d’afterworks et autres séminaires destinés à améliorer le bien-être des salariés et la cohésion d’équipe au sein des entreprises.

Même si elles sont plaisantes, de telles actions ne peuvent toutefois suffire à pérenniser la qualité de vie au travail. Certaines études récentes tendent même à démontrer des impacts négatifs sur la productivité et les performances si ces actions sont isolées et que leur déploiement n’est pas institutionnellement sensé.

Un nouveau panorama

C’est dans ce contexte que les organisations syndicales et patronales, ont conclu l’accord national interprofessionnel pour une prévention renforcée et une offre renouvelée en matière de santé au travail et conditions de travail[2] (QVCT), le 9 décembre 2020, au terme de plusieurs séances de négociation.

Cette construction propose une lecture plus élargie sur le travail et ses conditions de réalisations à proprement parler, en s’éloignant de mesures récréatives ou en tout cas trop déconnectées des réalités quotidiennes des salariées, au profit de l’intégration des conditions de réalisations du travail produit.

Les perspectives d’amélioration sont ici plus long-termistes, notamment par l’aspect collaboratif et co-constructif de la démarche. En ce sens le document précise « les salariés doivent pouvoir être impliqués dans les évolutions d’organisation qui touchent leur travail ». Ainsi il convient au minimum de consulter et idéalement d’engager la participation des salariés dans les réflexions qui s’intéressent notamment aux thématiques de santé et sécurité au travail. Leur mobilisation pourrait être plus particulièrement requise pour travailler sur les aspects opérationnels de compatibilité des locaux et ressources matérielles et organisationnelles ; de la prévention des troubles musculosquelettiques, de l’émergence de risques en lien avec les usages des nouvelles technologies ou encore de la prévention et de l’accompagnement des risques psycho-sociaux imputables à l’activité professionnelle.

Miser sur la prévention pour une efficacité des mesures

Ce texte réaffirme l’obligation de prévention définie dans le Code du travail et repositionne la culture de prévention primaire comme levier principal de la démarche d’amélioration de la qualité de vie et des conditions de travail. Ainsi l’accent est mis sur les outils de mise en œuvre de cette dimension préventive, qui s’articulent autour des services de santé au travail et de leurs acteurs.

Le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) y est défini comme indispensable à la construction d’une dynamique d’évaluation des risques, il permet en outre de développer un état des lieux, un plan d’actions et une traçabilité des actions engagées en vue de les prévenir au mieux. Incontournable, la maitrise de la santé et de la sécurité au travail doit être systématiquement intégrée dans les parcours de formation déployés par l’entreprise. Dans un souci de cohérence et de visibilité des formations suivies, le document consacre la création d’un passeport prévention pour les salariés, Il permettra de regrouper les attestions de formations obtenues.

La prévention y est également déclinée à travers la Prévention de la Désinsertion Professionnelle (PDP). Cet enjeu est majeur et doit faire l’objet d’un repérage précoce, il nécessite la mise en place d’un réseau permettant l’existence de démarche mutualisée. On voit ainsi naitre les cellules de PDP au sein même des services de santé au travail interentreprises. Le recours à cette cellule permettra ainsi la formalisation de l’analyse et de la mise en œuvre visant à prévenir et/ou corriger une situation justifiant un plan de retour à l’emploi. Le texte précise que la cellule devra se saisir de toute possibilité de reclassement interne ou externe en mobilisant le bilan de compétence et le CPF de transition professionnelle, en vue d’une lutte active contre la désinsertion.

Les managers au cœur du dispositif

« La place des managers est centrale et les pratiques managériales sont au cœur des évolutions attendues en matière de prévention et de qualité de vie au travail ». A travers cette affirmation, le texte formalise le besoin de s’appuyer sur des compétences managériales actualisées et ancrées dans les réalités de terrain.

La conduite parallèle de projets à la fois porteurs d’épanouissement professionnel pour les salariés et vecteurs de performances pour les entreprises, implique l’existence de maillages managériaux robustes et soutenus par les organisations.

Le déploiement de mesures préventives, le repérage de risques et/ou décrochage professionnel, le pilotage de plan d’actions ainsi que leur évaluation et réajustement sont autant d’activités managériales qui s’inscrivent dans un processus d’amélioration continue.

Au même titre que le concept de qualité, celui de QVCT ne peut en effet exister que s’il est issu d’une dynamique d’amélioration continue. La conduite d’une politique de QVCT intégrée ne pourra donc pas exister sans une politique de formation continue active et permettant à ces acteurs centraux de mobiliser les savoirs et outils contemporains nécessaires à l’atteinte d’objectifs institutionnels exigeants et d’impacts multiples.

Concrètement, une démarche spécifique et intégrée

L’accord a permis d’aboutir à une série de mesures et propositions utiles pour structurer une démarche émergente de QVCT.

Dans une logique de démarche projet, on visualise les différentes étapes de la réalisation préalable d’un état des lieux de l’existant, suivi d’un diagnostic à partir duquel on peut construire un plan d’actions, qui fera l’objet d’une expérimentation jusqu’à en formaliser l’évaluation selon des échéances prédéfinies. Suivant un plan précis des suggestions et attendus en termes de QVCT, le document sensibilise à une série d’indicateurs qui peuvent se révéler opportuns sur le sujet.

Toutefois il ne s’agit pas de dupliquer un plan type dans des environnements de travail qui se révèlent multiples et divergents. Ces éclairages ont en effet vocation à susciter l’appropriation institutionnelle de ce sujet capital. Ainsi chaque entreprise est invitée à adopter une démarche participative visant des co-constructions sensées au regard de ses propres besoins et spécificités.

Afin de réunir les ressources nécessaires, les sollicitations auprès des acteurs territoriaux sont à encourager. Ces partenariats ont vocation à accompagner l’engagement des entreprises dans les thématiques abordant le travail et ses conditions.

Conclusion

Cet article s’intéresse particulièrement à quelques-unes des nouveautés issues de l’ANI pour une prévention renforcée et une offre renouvelée en matière de santé au travail et conditions de travail, de nombreuses autres sont à découvrir et viennent compléter ce positionnement fort dont l’objectif général est d’améliorer la QVCT.

Ce sujet confronte les entreprises à une partie des leurs obligations légales, à leurs leviers d’attractivité des talents et plus généralement à la création de valeurs applicables à tous les domaines de la performance. Pour relever ce défi de taille aux enjeux incontournables, cette nouvelle dynamique incite les organisations à miser sur la maturité de leurs processus de promotion de la qualité de vie et des conditions de travail.

Nous avons vu que pour soutenir la conception et la mise en œuvre d’une approche systémique multidimensionnelle, les gouvernances devront permettre à leurs managers de mobiliser des capacités d’écoute, de négociation et de coordination solides. Plus que jamais la montée en compétences par les formations aux softs skills s’avère un investissement dont on ne saurait se dispenser pour qui poursuit ne serait-ce qu’un des objectifs indispensables à la pérennité d’une organisation de qualité.

C’est à ce prix que les entreprises pourront se révéler à la fois compétitives et génératrices de perspectives et de sens pour le monde de demain.

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