une personne seule sur un banc sous un arbre

Lonesome Cowboy, la solitude du manager

Avant, j’avais des collègues, maintenant j’ai des collaborateurs

Dans la très grande majorité des cas, on ne naît pas manager, on le devient. On nous propose de « prendre des responsabilités » après avoir apprécié notre travail en tant qu’opérationnel. Nous faisions partie d’une équipe, nous nous y sentions plus ou moins bien, mais ce qui est sûr c’est que statutairement nous étions tous sur un pied d’égalité. Nous avions le loisir de critiquer notre chef, l’institution à loisir, de remettre en question les décisions prises, les actions menées à la machine à café.

Oui mais voilà, quand on monte l’échelle hiérarchique, le nombre de nos acolytes a une fâcheuse tendance à diminuer. D’une équipe parfois nombreuse, nous appartenons maintenant à la catégorie pour le moins clairsemée du management dit fonctionnel ou intermédiaire.

A compter de ce jour, les relations avec les membres des équipes changent. Fini les plaisanteries à la cantine, les critiques des orientations stratégiques voir même les discussions personnelles sur les vacances ou les exploit du petit dernier. Le ton change, la familiarité devient compliqué. Peu à peu on perçoit une distance s’installer, un certain formalisme dans la manière dont les membres de l’équipe s’adresse à nous, ils déjeunent ensemble sans nous. Ce changement de considération peut être très déstabilisant.

Une distance nécessaire

La distance qui s’installe entre le manager et ses collaborateurs, quand bien même elle peut être désagréable, est nécessaire à la perception par l’équipe mais aussi par le manager de sa place et de fait, de sa crédibilité. Même si une certaine proximité est toujours possible avec tout ou partie de ses membres, l’équipe a besoin de savoir qui prend les décisions, qui donne la direction. L’autorité (a ne pas confondre avec l’autoritarisme) à deux fonctions principales : la sécurisation et la stimulation.(voir article Management et Autorité)

Le manager a une fonction de stimulation par la reconnaissance qu’il peut et doit témoigner à ses collaborateurs. Qu’elle soit positive ou négative, c’est la reconnaissance d’un supérieur hiérarchique, davantage que celle de ses collègues, qui pousse les personnes à agir.

Or, si le manager ne témoigne pas d’une différence notable entre sa posture et celle de ses collaborateurs, s’il tente de préserver une relation où il adopte les mêmes attitudes, les mêmes réflexes, il lui sera hautement complexe de gagner la confiance de l’équipe. En cas de problème, de difficultés, ses membres ne pourront se tourner vers lui puisqu’il n’aura d’autres solutions que les leurs… La reconnaissance qu’il pourra leur témoigner n’aura pas non plus de réelle valeur ajoutée puisqu’elle s’apparentera à celle de leurs collègues directs.

La juste distance nécessaire à la fonction de manager est un élément qui vient renforcer un sentiment de solitude. L’enjeu est donc de trouver du soutien, un groupe d’appartenance ailleurs.

Le chef du chef reste un chef

Il pourrait être tentant de se dire que si les opérationnels, nos anciens compairs ne peuvent plus constituer un soutien, une oreille attentive, alors peut être que notre propre manager pourrait devenir notre nouveau comparse. Oui mais voilà, notre manager lui aussi doit veiller à sa position, la distance juste qu’il établira avec nous afin de lui même conserver sa crédibilité et constituer un soutien pour nous, dans notre exercice. Et puis après tout, qui pourrons nous critiquer, de qui pourrions nous nous plaindre nous mêmes si l’on ne peut le faire de notre « chef » si proche?

Trouver du soutien ailleurs

Ainsi, la fonction de manager est une fonction par définition solitaire puisqu’elle demande de juger, prendre des décisions, trancher seul. Afin que l’isolement ne finisse par devenir un poids trop important ou par avoir des conséquences sur l’exercice, il est donc important de pouvoir trouver du soutien ailleurs. Si cela est possible, il peut être très profitable de se rapprocher d’autres managers de la même institution afin de partager ses doutes, ses difficultés, ses questions avec des personnes familières du fonctionnement et des problématiques en lien avec l’environnement. On recrée ainsi une équipe de pairs, certes plus réduite mais dans laquelle on aura la possibilité de partager et donc de se sentir moins seul au quotidien.

Quand cela ne peut se faire du fait de l’isolement ou quand il n’y a simplement pas d’autres managers aux alentours, il peut être souhaitable d’élargir son horizon à d’autres secteurs de l’organisation voire même hors de cette dernière. Des groupes de managers sur les réseaux sociaux, des groupes de pairs à l’échelle de la région ou autre sont un bon moyen de trouver des espaces d’échanges et de partages de pratiques. Car l’intérêt principal de l’échange entre pairs est la possibilité de recueillir d’autres points de vue, de se rendre compte que d’autres partagent les mêmes difficultés, de prendre de la distance pour mieux réfléchir et donc s’améliorer.

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